GASTRONOMIE :
UN REVEILLON DE FETE
par Modeste Mignon,
Personnage balzacien,
Médiologue,
Critique gastronomique.


Modeste Mignon, vu de trois-quart

Comme tout le monde, vous êtes désemparé. Comment faire pour fêter en beauté cette fin de millénaire, qui coïncide avec la fin du siècle ? Comment épater vos amis avec discrétion, pour qu'ils se souviennent éternellement de cette soirée ? Comment, en un mot, associer votre nom à ce changement de millénaire, du moins dans l'esprit de ce qui vous tient lieu de relations ?
L'affaire n'est pas évidente. Je jouerais volontiers les mystérieux, pour vous faire lanterner jusqu'au bas de mon article, mais tout est dit dans le sommaire. En effet, pour étonner votre entourage par votre génie inventif, rien ne vaut un bon saucisson bien gras avec des grains de poivre, accompagné d'un verre ou deux de Beaujolais nouveau. Ca n'a l'air de rien comme ça, mais si je vous disais que les résultats sont garantis ?
Pour le prouver, nous avons interrogé quelques personnalités médiatiques bien connues. Régis Debray en pleine dégustation du dernier Beaujolais
  - Alors Régis, qu'est-ce que tu en dis de mon idée ? Pas mal hein ?
- Mouais, si on veut... Mais il vient d'où ton Beaujolais ?
- Mais, mais, tu sais bien ! On l'a acheté ensemble ! De l'arabe du coin, comme toujours quand on fait les provisions médiologiques.
- Eh ben figure-toi que j'en ai goûté un bien meilleur. Ouais mon ptit père.
- Ah oui ? Bon ben tu me donneras l'adresse, j'irais y tremper mes petites lèvres mignonnes. Mais c'est pas ce que je voulais te demander. Tu sais que je t'ai invité pour Noël, bon. J'avais prévu de... Enfin je devrais pas te le dire, ça devait être une surprise. J'avais prévu de faire une énorme saucisson-party, arrosée d'un verre de Beaujolais. Peut-être deux pour les soiffards. Voilà. Qu'est-ce que tu en dis ?
- Ah, bon sang, tu fais bien de m'en reparler. 
- Oui.
- Non mais parce que, j'avais complètement oublié de t'en parler...
- Ah pourtant on se voit tous les jours aux Cahiers de médiologie, Régis, comment tu peux oublier de me parler de quelque chose ?
- Non Modeste mais c'est que tu te souviens du Kossovo ?
- Vaguement. C'est là où il y a des bonnes boulangeries ?
- Oui, et des pizzas. Bon, le gouvernement veut absolument que j'aille relever Bernard Kouchner comme gouverneur de là-bas. Ils m'ont dit que tant pis si ça déplaît aux Amerloques. 
- Ca me semble bizarre cette histoire. Tu es sûr qu'on t'a pas fait une blague ?
- Non, non, j'te jure que c'est Lionel lui-même qui m'a appelé.
- Etrange, à moi il n'a rien dit. Bon, quel rapport avec mon réveillon ? Tu voudrais du camembert en plus, c'est ça ?! Non mais dis-le, allez !
- Rhooo, je sais pas comment te dire ça Modeste... Voilà, je ne pourrais pas être des vôtres.
- Des vautres ? Comme si tu savais être autre chose qu'un vautre, grosse andouille ! Alors, explique-toi !
- Par respect des populations civiles, je suis obligé de passer les fêtes avec elles... Crois-moi, c'est pas de gaieté de coeur. Je préférerais être avec vous, à me poiler comme un malade et à boire un verre de Beaujolais. Ou deux.
- Quoi ?!! Tu te défiles ? Oh mais c'est pas croyable. Bon plus qu'une seule solution.
- Euh cela dit, ton idée de repas est excellente. Saucisson, Beaujolais, c'est très bon. Je t'encourage à la mettre en pratique.
- Ta gueule. Jte cause pus.
Si Régis remplace Bernard, Bernard n'a qu'à remplacer Régis. Bernard Kouchner, en train de tourner dans sa bouche une goulée de Beaujolais nouveau
  - Bernard, c'est vrai ce que le tout-Paris raconte ? Tu vas être viré du Kossovo ?
- De quoi de quoi ? Tu crois vraiment qu'on remercie un prix Nobel de la Paix comme un malpropre ? Et pourquoi pas crucifier Elie Wiesel tant que tu y es ?
- Mais enfin, Bernard, j'ai vu Régis tout à l'heure et il m'a dit que...
- Adieu, Régis Debray !
- Hein ? Mais pourquoi dire ça ?
- Fini. Je veux plus le voir.Vive la vie, sans Régis Debray !
- (à part soi : Ciel ! Régis m'aurait-il menti ?) Mais Bernard, franchement, qu'est-ce que tu en penses de mon idée d'un réveillon à la bonne franquette ?
- C'est-à-dire ?
- Facile : trois saucissons par personne, et un verre de Beaujolais ou deux pour chacun. 
- C'est bombance dis-moi Modeste !
- Oui, et c'est moi que j'en ai eu l'idée tout seul dans ma tête.
- Bien bien, c'est bien, bravo. Excellente initiative. Bonne année, si on ne se revoit pas d'ici là.
- Mais attends, Bernard, puisque, enfin puisque tu seras peut-être pas au Kossovo, je comptais vous inviter toi et Christine, comme ça tu jugerais par toi-même comme c'est bon les petits plats simples.
- Halte là, mon gaillard : je t'ai dit que je restais à Pristina. D'ailleurs, même si j'avais la permission de fin d'année, je me demande si j'irais chez toi. J'ai un peu peur de m'enivrer. Trop de vin, trop d'esprit, tout ça va me faire tourner la tête et je vais faire honte au pays dont je suis officiellement ressortissant. Bonne année Modeste. Bye, il faut que j'y aille.
- Attends, Berna...
- Hein ?, je t'entends plus, allez salut mon petit ! (Bernard K. s'éloigne en side-car à vive allure)
C'est ainsi que je suis très disponible pour les fêtes. Si jamais mon programme vous a enthousiasmé, vous pouvez m'écrire en précisant l'objet "réveillon Modeste". On s'en mettra plein la panse. A la bonne vôtre !  
Me laissez pas tout seuuuuul !
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