EUROPE :
LA FORCE DE L'UNION
par Michèle,
Championne de bond gigantesque.


Le péril
Souvenez-vous... C'était un 20 septembre... Il était 20h, un dimanche soir, et pour une fois vous n'aviez pas du tout hâte d'entendre la météo marine sur France Inter, juste avant le Masque et la Plume...
Oui, ce 20 septembre, vous aviez bien d'autres préoccupations que ces futilités... Car ce soir-là, c'était un peu le sort de millions d'êtres humains qui se jouait. Et si vous lisez ce Journal, c'est que vous avez assez de jugeotte pour avoir su que la France courait ce soir-là un grand danger. Le 20 septembre 1992 à 20 h, nous apprenions que la France avait massivement dit OUI au traité de Maastricht, et dans tous les terriers d'Europe on n'entendit qu'un immense soupir de soulagement. Puis les bruits de mastication reprirent.
Que serait-il advenu si d'aventure le non l'avait emporté ?! Nul n'ose y songer. Pierre Bérégovoy, le regretté premier ministre d'alors, avait bien averti que les taux d'intérêt grimperaient et rendraient tout gros achat impossible. On murmurait que l'Allemagne romprait ses relations diplomatiques dans la nuit suivant cette Bérézina. Et les mieux informés assuraient que le chômage atteindrait des sommets inégalés. (On parlait du seuil symbolique des 3 millions !) Autant le dire tout net : nous l'avons échappé belle. Par bonheur, et contre les pantins hideux défenseurs d'un nationalisme étriqué, s'étaient élevées des personnalités nobles et vertueuses, jeunes et femmes pour la plupart, souvent détenteurs et détentrices de diplômes d'excellence. Par chance surtout, le président Mitterrand avait eu le coup de génie de mettre tout son poids dans la balance, hors sa prostate.

L'Europe d'aujourd'hui : un extraordinaire vivier de passions et de rêves
Réjouissons-nous, car ce combat quotidien vers davantage d'intégration européenne trouve dans la jeunesse un écho sensible et suscite des vocations. Ainsi, un petit groupe d'étudiants en prépa HEC du lycée Hoche a décidé de monter un vaste site sur l'Union européenne. A cette adresse, mise en place il y a seulement 6 mois et qui compte déjà plus de 600 visites (en comptant celles des auteurs et les nôtres), on trouve des informations à foison. Ainsi dans la page d'actualité, on peut trouver jusqu'à deux adresses distinctes, dont l'une vers le Monde diplomatique et son dossier sur l'OMC. Gare aux internautes impénitents : dans les méandres de ce site immense et foisonnant, ils risquent bien de passer des heures entières à en explorer les derniers recoins. Avec ces petits génies qui intégreront, nous l'espérons, HEC puis l'ENA puis la Commission de Bruxelles, la relève de l'argumentaire européiste est assurée. On trouve par ailleurs un somptueux forum où les messages (six jusqu'à présent, dont trois de la même personne) témoignent de la liberté d'esprit qui règne sur ce forum : chez les européistes, on supporte de se voir contredit. Chez les eurosceptiques en revanche, on est tout de suite dédaigneux, sarcastique ou hautain. En plus on est laid. Sur ce site, on trouve également une page de liens, où nous voyons confirmée notre première impression de liberté de parole puisqu'on trouve même l'adresse d'un site eurosceptique. Et, comme l'ont finement relevé nos amis prépas HEC, ce sinistre site est tel que " [leur] Réflexion est décrite comme "révélatrice de la pauvreté de la pensée et de la fadeur de la soupe européiste"." (sic pour la majuscule à Réflexion) Tsss... Quelle honte, quel aveuglement. Remontons-nous le moral, écoutons de la grande musique : chez nos amis, vous pourrez écouter le majestueux Hymne européen. Vous savez, c'est ça qu'on appelait dans le temps l'Hymne à la joie. Moi depuis que je sais que c'est devenu l'Hymne de mon pays véritable, je le fredonne sans arrêt, et les larmes me viennent aux yeux, comme ça, toute seule dans la rue. Que c'est beau l'Europe. Après ce moment d'émotion, on se dit qu'on va peut-être aller lire quelque chose de consistant sur ce site, parce que les pages de liens c'est joli mais bon. Malheureusement, le plat de résistance de ce site superbe est actuellement indisponible : "Notre Réflexion sur l'Europe n'est pas disponible pour l'instant. Merci de votre compréhension." Oui, montrons-nous compréhensifs, si sur ce site c'est bien la "Réflexion" qui fait défaut.

L'Europe de demain : la paix, la prospérité, la joie de vivre et le potage à la tomate pour tous
Un autre site, encore plus talentueux mais tout aussi en construction, nous fait entrevoir les lendemains qui chantent : à n'en pas douter, "l'européisme est un humanisme". Car, comme le regrette avec nous Arnaud Guerber, "aujourd'hui encore, il faut malheureusement souvent se justifier d'être européiste." C'est quand même un comble ! Est-ce qu'on devrait se justifier aussi de manger des carottes et de respirer de l'oxygène, messieurs les europhobes ?! En fait on ne se lasserait pas de citer cet auteur comparable à un Pascal (Bruckner). Exemples : "Le procéssus (sic) d'unification européenne est à ce jour dans le monde, la première étape vers une maturité politique de l'humanité, un progrès de son degré civilisationnel.", "Ca s'impose donc: GLOIRE A L'EUROPE!", etc, etc, etc. La partie la plus percutante de ce site est pourtant à venir. Car l'auteur a une conviction, qu'il assène sans hésitation toutes les dix lignes : vive l'Europe, car sans elle c'est la guerre. Pour mieux asseoir sa démonstration (mais était-ce bien nécessaire ?) l'auteur va apparemment sous peu créer une galerie virtuelle dont on peut déjà voir les photos, et où il exposera les ravages du premier conflit mondial. Nul doute que ce choc convaincra les plus obstinés. Car comment ne pas comprendre que ceci n'aurait jamais été possible, si Jacques Delors ou Romano Prodi avaient gouverné notre malheureux continent en ce temps-là ?
Comme toujours, ce site reste ouvert aux pitoyables eurosceptiques. Arnaud en a trouvé un particulièrement vilain, où les mensonges s'enchaînent aux mensonges.

L'Europe d'hier : des nations en guerre, affamées, lépreuses, et ne sachant pas même naviguer sur le Web
Sur ce site qui blesse les sensibilités délicates, et qui est à déconseiller aux enfants, on trouve des affirmations aussi dénuées de fondement que les suivantes :

"l'Union européenne se construit contre la volonté des peuples
 l'Union européenne n'a pas apporté la paix en Europe
 l'Union européenne ne sera jamais une puissance diplomatique indépendante des États-Unis (elle ne cherche pas à l'être)
 l'Union européenne n'a pas contribué à la prospérité de l'Europe
 l'Union européenne ne résorbera pas le chômage. Les principes économiques qui guident l'union monétaire sont tous erronés
 l'euro ne détrônera jamais le dollar (et n'a pas intérêt à le faire)
 l'Europe est la terre promise des frileux et des invertébrés
 la souveraineté partagée est une imposture pour masquer la souveraineté abandonnée
 l'Union européenne n'est pas l'Europe"

Cette avalanche de menteries est tellement énorme, qu'on se demande s'il faut y répondre. La plus choquante est sans conteste l'affirmation selon laquelle l'Union n'a pas apporté la paix. Allez demander aux petits Bosniaques ce qu'ils en pensent, Monsieur le triste sire! Tous, ils vous répondrons "Merci l'Europe", car c'est grâce aux efforts conjugués de l'Allemagne et de la France que la Yougoslavie a fini par régler ses problèmes, ou ses différends. Allez demander aux petits Kosovars, Monsieur le sans-coeur! Et allez, dans quelques semaines, le demander aux petits Groznyens, Monsieur le moqueur, quand cette construction que vous honnissez aura réglé son compte à l'ivrogne du Kremlin, grâce à l'Eurocorps! Et puis zut aux grincheux après tout! Pourquoi s'obstiner à parler à des bac moins treize originaires de cantons ruraux et qui votent de temps en temps Front national? Vous êtes un petit français : vous ne serez jamais un Grand Européen.

Vive la vie !
Pour finir sur une note moins macabre, revenons à notre ami Arnaud Guerber, et récitons-nous quelques-unes de ses phrases puissantes. "Ce qui nous exite (sic), nous les européistes, est justement ce qui rend frileux les eurosceptiques." Moi qui ne suis pas frileuse, et même plutôt chaude, j'ai bien envie de me laisser exciter par les appétits d'Europe. Mais ne nous y trompons pas ; avec l'euroscepticisme, c'est devant cette alternative que nous nous trouvons : "MOURIR POUR LA FRANCE OU VIVRE POUR L'EUROPE..." Moi, et toute la rédaction derrière moi, avons fait notre choix : OUI, nous voulons vivre pour l'Europe, et rien que pour elle. Freude, schöne Götterfunken...



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